New York, le 14 juillet 2014 – Les attaques contre les enseignants et autres membres du personnel de l’éducation sont une tactique extrêmement répandue de la guerre et une menace sérieuse pour l’éducation, a déclaré la Coalition mondiale pour protéger l’éducation des attaques (GCPEA) dans une nouvelle étude publiée aujourd’hui, Protéger le personnel de l’éducation contre des attaques ciblées dans les pays touchés par un conflit. Le rapport décrit comment les enseignants ont été pris pour cible dans le monde entier et documente diverses façons dont les communautés ont tenté de les protéger.

« Le Jour de Malala, nous devrions également nous rappeler le courage d’enseignants comme le père de Malala, qui mettent trop souvent leur vie en danger tout simplement en se rendant au travail et en faisant leur travail », a déclaré Diya Nijhowne, directrice de la GCPEA. « Les attaques contre les enseignants frappent au cœur même de la communauté et davantage d’efforts doivent être entrepris pour les protéger. »

Le Jour de Malala – le 14 juillet – célèbre le courage de Malala Yousafzai, l’écolière et militante pour l’éducation pakistanaise frappée par les tirs des talibans en 2012 à cause de son travail de promotion de l’éducation des filles.

Le rapport de 50 pages s’appuie sur des entretiens menés auprès de praticiens du monde entier, sur des documents d’organisations internationales et locales, et sur des recherches de terrain aux Philippines.

Il met en lumière l’impact dévastateur de la violence contre les enseignants pour le système d’éducation. Les attaques peuvent affaiblir le corps enseignant car les enseignants et les professeurs sont intimidés, blessés, tués ou contraints de fuir. À plus long terme, elles peuvent aggraver la pénurie d’enseignants, perturber les cycles de formation et d’emploi ainsi qu’avoir un impact sur le développement d’un pays.

« Dans de nombreux endroits, il existe déjà un écart important entre le nombre d’enseignants formés et la demande d’éducation », a indiqué Diya Nijhowne. « Quand les bas salaires sont aggravés par le risque d’attaques, il existe peu d’incitation à entrer et à rester dans la profession enseignante, ce qui affaiblit davantage le système de l’éducation. »

Les enseignants pris pour cible dans au moins 23 pays depuis 2009

Au cours des cinq dernières années, les enseignants et autres personnels de l’éducation ont été victimes d’assassinats, tués, blessés, torturés, détenus, extorqués et harcelés dans des zones de conflit et d’instabilité dans au moins 23 pays, selon Education under Attack 2014. Au Nigeria, où le groupe militant Boko Haram a enlevé près de 300 écolières il y a de cela exactement trois mois, le président de l’Union nationale des enseignants a indiqué que le groupe avait également tué 171 enseignants depuis 2009.

Les motifs des attaques varient. Certains éducateurs sont confrontés à des menaces en raison de leurs activités en classe : ils refusent de permettre aux parties armées de recruter des enfants des écoles, ils enseignent aux filles, ou leurs leçons portent sur des sujets particuliers et non sur certains autres. D’autres sont pris pour cible en raison de leur appartenance ethnique, de leur association avec le gouvernement ou une partie belligérante, de leurs activités politiques, ou parce qu’ils s’engagent dans le plaidoyer en faveur de l’éducation.

Aux Philippines, par exemple, le personnel de l’éducation est tenu de servir en tant que travailleurs électoraux lors des élections, ce qui entraîne une recrudescence des attaques contre les enseignants pendant les périodes de vote. Avant les élections de 2010 à Maguindanao, des inconnus armés ont assassiné un directeur et un enseignant dans une école primaire qui est régulièrement utilisée comme bureau de vote. Les enseignants aux Philippines ont également été victimes de harcèlement et d’attaques lorsque les écoles ont été utilisées par des parties armées à des fins militaires, en tant que casernes et camps, en dépit des lois nationales interdisant cette pratique.

Protéger les enseignants contre les attaques

Les éducateurs confrontés à des attaques nécessitent davantage de protection, selon la GCPEA. Le nouveau rapport examine une série de mesures prises pour protéger les enseignants, notamment : armer les enseignants, utiliser des gardes civils armés et non armés, mettre en place des comités de protection de la communauté, relocaliser et transférer les enseignants, négocier avec les parties belligérantes afin qu’elles se tiennent à l’écart des écoles et des enseignants, ainsi que surveiller et signaler les attaques. Certaines de ces mesures comportent leurs propres risques. Des gardes armés dans le sud de la Thaïlande, par exemple, sont eux-mêmes devenus les cibles d’attaques, plaçant dans la ligne de mire les enseignants qu’ils étaient précisément embauchés pour protéger.

Le rapport évalue également les stratégies visant à prévenir les attaques sur le long terme, notamment accroître la responsabilisation et mettre fin à l’impunité pour les attaques, en adoptant des lois et des politiques de protection et en élaborant des programmes et des politiques d’éducation sensibles aux conflits. Les syndicats d’enseignants et les organisations de défense des droits humains en Colombie et au Zimbabwe, par exemple, ont amené des criminels devant les tribunaux pour des attaques contre des enseignants, avec un certain succès en Colombie.

Enfin, le rapport offre des conseils aux praticiens et aux décideurs sur ce qu’ils peuvent faire pour aider à améliorer la sécurité des enseignants.

« Les enseignants jouent un rôle primordial pour l’enrichissement et l’inspiration de la prochaine génération de leaders comme Malala », a conclu Diya Nijhowne. « Pour le bien de leurs enfants, de leurs sociétés et de leur avenir, il est impératif que les États galvanisent les efforts et les ressources pour protéger les enseignants. »

Pour télécharger le rapport : [anglais] [français]